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- 2022 Issues
- Numéro 37
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Les programmes de prévention des blessures comprenant des exercices d'équilibre réduisent le risque de blessures à la cheville chez les joueurs de football : revue systématique.
POINTS CLÉS
- Les exercices d’équilibre réduisent efficacement le risque d'entorse de la cheville de 36 % pour 1000 heures d'entrainement.
- Le type d’exercice optimal n'est pas déterminé, mais il doit comporter des exercices difficiles d'équilibre sur une seule jambe, des parcours sur des surfaces instables et l'introduction de tâches motrices précises (attraper une balle, sauter et tenir sur une jambe etc.).
- Les effets cliniques positifs associés aux exercices d’équilibre sont probablement dus au haut niveau d'observance des athlètes, maintenu sur une période de 6 mois.
CONTEXTE ET OBJECTIFS
Les entorses de cheville sont parmi les blessures aiguës les plus courantes dans les sports d'équipe comme le football. Un grand nombre d'athlètes ne récupère pas complètement après une entorse de cheville, et peut ainsi développer des symptômes chroniques tels qu’une instabilité, une douleur et des blessures récurrentes. Il est nécessaire de développer des stratégies efficaces pour la prévention primaire des entorses de cheville en football ; il est également important que ces stratégies puissent être facilement mises en œuvre dans la pratique clinique.
La revue systématique et la méta-analyse ont examiné si les programmes de prévention des blessures incluant des exercices d'équilibre réduisaient efficacement l'incidence des entorses de cheville chez les joueurs de football.
Les cliniciens doivent promouvoir un minimum de 2 à 3 séances d'entraînement à l'équilibre chaque semaine.
MÉTHODE
Cette revue a été enregistrée prospectivement et ses méthodes ont été alignées sur les recommandations PRISMA (Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analysis).
La stratégie de recherche était claire et deux auteurs ont indépendamment examiné quatre bases de données principales (Cochrane, Web of Sci, Pubmed, PEDro).
Les études incluses étaient des essais contrôlés randomisés en anglais avec pour participants des joueurs de football (hommes ou femmes) affectés soit à un programme de prévention des blessures avec un entraînement à l'équilibre, soit à un programme d'échauffement standard.
L'extraction des données standardisée comprenait : la posologie de l'intervention, l'adhésion de l'athlète (à l'intervention), l'exposition au jeu et l'incidence des blessures. La principale méta-analyse s'est concentrée sur le Ratio du Taux d'Incidence (RTI) - cette statistique représentait l'incidence des blessures du "groupe d'équilibre" divisée par l'incidence des blessures du "groupe témoin". Pour le contexte, les RTI de 1 représentent une conclusion nulle, où l'incidence des blessures était la même dans chaque groupe.
RÉSULTATS
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9 grands ECR ont été inclus, avec des données agrégées de 9634 joueurs de football, recrutés sur 4 continents.
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L'âge des participants était de 7 à 35 ans et le niveau de compétition allait des footballeurs jeunes, collégien/lycéens, jusqu’au niveau de première division
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La durée moyenne de l'entraînement d’équilibre était en moyenne de 7 mois (de 10 semaines à 12 mois) et l'adhésion des participants à l'intervention était élevée, avec deux tiers des études obtenant plus de 75 % d’adhésion.
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Un total de 529 entorses de cheville se sont produites sur 775 606 heures d'exposition au jeu. 63 % (333/529) des entorses sont survenues dans les groupes témoins, contre 37 % (196/529) dans les groupes d'entraînement à l'équilibre.
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Il y avait également un résultat clair en faveur de l'entraînement à l'équilibre lorsque les cliniciens ont contrôlé l'exposition au jeu, sur la base d'un RTI combiné de 0,64 (IC à 95 % 0,54-0,77), ce qui équivaut à une réduction du risque d'entorse de la cheville de 36 %. Cf. Figure 1.
LIMITES
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Bien que la revue ait inclus près de 10 000 joueurs de football, il n'y avait suffisamment pas d'études individuelles pour entreprendre des analyses poussées de sous-groupes.
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88 % (8/9) des études incluses ont utilisé une conception randomisée en groupes. Sans conception soignée, les essais en groupes peuvent introduire une source unique de biais (connu sous le nom de biais d'identification/recrutement), par lequel les individus sont recrutés dans l'étude après que les équipes aient été affectées à différentes interventions.
IMPLICATIONS CLINIQUES
Les programmes multi-interventionnels qui incluent l'entraînement à l'équilibre se sont avérés efficaces dans la prévention primaire des blessures des membres inférieurs dans le sport (1). Dans cette revue systématique et cette méta-analyse bien réalisées, les auteurs fournissent des preuves supplémentaires en faveur de l'intégration d'un entrainement d’exercices d'équilibre dans le programme d'entrainement hebdomadaire d'un athlète.
L'un des points forts de la revue était l’analyse des taux d'incidence des blessures, plutôt que de simplement tirer des conclusions sur la prévalence des blessures (nombre de participants ayant subi une entorse). En contrôlant les variations d'exposition au jeu, les résultats fournissent une estimation plus précise et plus significative du risque de blessure. L'effet global (regroupé) dans les 9 études était important et cliniquement significatif, basé sur une réduction de 34 % du risque d'entorse de la cheville pour 1000 heures de jeu. Il convient de souligner qu’un joueur professionnel accumulera environ 300 heures d'exposition de jeu par saison (2).
Bien que les auteurs n'aient pas été en mesure d'établir une relation dose-effet pour les interventions visant à travailler l'équilibre le consensus à partir des données disponibles est que les cliniciens devraient encourager un minimum de 2 à 3 séances d'entraînement à l'équilibre chaque semaine. Il est également probable que la réduction optimale des risques soit obtenue grâce à des niveaux élevés d’adhésion des athlètes, qui se maintiendraient sur une période prolongée (la durée moyenne de l'intervention était de 7 mois).
Nous savons que même dans les sports professionnels, l'adhésion des joueurs à des stratégies efficaces de prévention des blessures (telles que le Nordic Hamstring Curl pour les ischio-jambiers) peut être aussi faible que 20 % (3). Il incombe donc aux cliniciens (et aux entraineurs) de créer un environnement et une culture d'équipe où les athlètes s'approprient les principales stratégies de prévention des blessures telles que les exercices d'équilibre.
+RÉFÉRENCES
RÉFÉRENCES CITÉES
- Hubscher, M., Zech, A., Pfeifer, K., Hansel, F., Vogt, L. and Banzer, W., 2010. Neuromuscular Training for Sports Injury Prevention. Medicine & Science in Sports & Exercise, 42(3), pp.413-421.
- Hagglund, M., M Walden., J Ekstrand., 2006. Previous injury as a risk factor for injury in elite football: a prospective study over two consecutive seasons. British Journal of Sports Medicine, 40(9), pp.767-772.
- Bahr, R., Thorborg, K. and Ekstrand, J., 2015. Evidence-based hamstring injury prevention is not adopted by the majority of Champions League or Norwegian Premier League football teams: the Nordic Hamstring survey. British Journal of Sports Medicine, 49(22), pp.1466-1471.