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Renforcement antéro-médial vs postero-latéral de la musculature de la hanche en contrôlant la posologie chez les femmes souffrant de douleurs fémoro-patellaires : essai randomisé contrôlé
POINTS CLÉS
- 46 femmes souffrant de douleurs fémoro-patellaires ont été incluses dans cet ECR qui comparait le renforcement des muscles antéro-médiaux de la hanche (adducteurs, fléchisseurs et rotateurs internes) avec les muscles postéro-latéraux de la hanche (abducteurs, extenseurs et rotateurs externes).
- Les deux groupes ont également effectué un échauffement, des étirements et des exercices de renforcement des genoux.
- L'intensité et la fonction de la douleur se sont améliorées dans les deux groupes sans différence significative des critères d'évaluation primaires entre les groupes.
CONTEXTE ET OBJECTIFS
La douleur fémoro-patellaire (DFP) est reconnue comme une affection multifactorielle, mais dans laquelle des exercices pour renforcer les muscles de la hanche et du genou peuvent être bénéfiques (1). Très souvent, les exercices de la hanche ont eu tendance à se concentrer sur les muscles fessiers, ce qui peut être efficace pour améliorer la douleur et la fonction, en particulier lorsqu'ils sont combinés avec le renforcement des quadriceps (2). Le mécanisme d'action exact n'est pas clair et certaines études montrent que l'ajout d'un travail de force en plus de l'éducation et de la modification de l'activité n'améliore pas significativement les résultats (3).
Cela soulève des questions intrigantes : est-il vraiment important de savoir quels muscles sont la cible de notre rééducation ? Y a-t-il d'autres muscles de la hanche qui pourraient tirer un bénéfice d'un renforcement ? Cette étude a cherché à explorer cette question en comparant l'efficacité du renforcement des muscles antéro-médiaux de la hanche à celle du renforcement postéro-latéral de la hanche.
L'évaluation de la force de chaque patient devrait nous aider à identifier la priorité de rééducation.
MÉTHODE
Cet essai contrôlé randomisé a recruté 52 femmes atteintes de DFP, dont 46 ont terminé l'étude et toutes les évaluations. Les participantes ont été randomisées soit dans le groupe renforcement antéro-médial de la hanche (AMHG), soit dans le groupe renforcement postéro-latéral de la hanche (PLHG).
Les deux groupes ont effectué un échauffement et des étirements pour les ischio-jambiers, les abducteurs, les adducteurs, les quadriceps et les muscles du mollet, ainsi que des exercices de squats et d'extension des genoux assis pour renforcer les quadriceps. En plus de cela, le groupe PLHG a effectué des abductions de hanche en décubitus latéral (DL), des clamshells résistés [abductions résistées de hanche, genoux fléchis en DL] et des rotations externes de hanche résistées, tandis que le groupe AMHG a effectué des adductions de hanche en DL, des adductions en DL en serrant un anneau, et des rotations internes de hanche contre résistance. Regardez la vidéo pour visualiser ces exercices.
EXERCICES DE RENFORCEMENT DE LA HANCHE
Tous les exercices de renforcement ont été prescrits en 3 séries de 8 à 12 répétitions à 60-80 % RPE (niveau d'effort perçu). Les séances d'exercices étaient supervisées, duraient en moyenne 60 minutes et étaient répétées deux fois par semaine pendant 6 semaines.
Les critères d'évaluation principaux étaient l'intensité de la douleur (sur une échelle numérique) et la fonction évaluée par l'échelle Anterior Knee Pain Scale à 6 semaines. Les critères d'évaluation secondaires comprenaient des tests de force isométrique et un valgus dynamique du genou lors d'un test de descente de marche.
RÉSULTATS
Les deux groupes ont démontré des améliorations de la douleur et de la fonction, mais il n'y avait pas de différences significatives des critères d'évaluation principaux entre les deux groupes (à 6 semaines ou à 6 mois). Le groupe PLHG a rapporté une réduction de l'intensité de la douleur d'une moyenne de 5,27 initialement à 1,15 à 6 semaines. Le groupe AMHG a eu des améliorations similaires en passant de 5,04 initialement à 0,57 à 6 semaines. Malgré les améliorations de la force, il n'y a eu aucun changement significatif du valgus dynamique du genou dans les deux groupes.
LIMITES
- Il s'agissait d'une étude sur des femmes atteintes de DFP. Les résultats peuvent donc ne pas être applicables aux patients de sexe masculin.
- L'intervention était multimodale avec des étirements, un renforcement des genoux et des hanches. On ne sait pas laquelle de ces interventions peut avoir entrainé les améliorations rapportées.
- L'absence d'un véritable groupe contrôle sans intervention [avec une approche attentiste "wait & see"] rend également difficile d'exclure l'histoire naturelle / l'amélioration au fil du temps, ou les effets contextuels liés aux exercices supervisés réguliers et aux interactions avec les thérapeutes.
IMPLICATIONS CLINIQUES
Il s'agit d'un ECR de relativement faible envergure, nous devons donc être prudents dans l'application de ses résultats sans les regarder de plus près. Les résultats suggèrent que nous devrions envisager de renforcer les muscles antéro-médiaux de la hanche (fléchisseurs, adducteurs et rotateurs internes) chez les femmes atteintes de DFP, et ils contribuent aux preuves existantes suggérant que le renforcement postéro-latéral de la hanche est également efficace. L'évaluation de la force de chaque patient devrait nous aider à identifier la priorité de rééducation.
L'un des résultats secondaires est particulièrement intéressant : le renforcement ne semble pas altérer le valgus dynamique du genou lors d'une descente de marche. Ceci est conforme à d'autres recherches qui ont rapporté que le travail de renforcement seul n'a pas tendance à modifier de manière significative les schémas de mouvement. Par exemple, le renforcement des fessiers n'entrainera généralement pas une diminution du mouvement d'adduction de hanche. De même, le renforcement des adducteurs n'est pas susceptible d'augmenter l'adduction de hanche pendant un mouvement fonctionnel. Si notre objectif est de modifier les schémas de mouvement, le mouvement spécifique lui-même doit être pratiqué avec des sollicitations verbales, visuelles, manuelles [cues] appropriées pour atteindre l'objectif de mouvement.
Une dernière réflexion est que l'approche du renforcement avec 3 séries de 8 à 12 répétitions à 60-80 % de la RPE est cohérente avec d'autres recherches et peut fournir une approche assez simple et cliniquement applicable pour l'augmentation de la force chez les patients atteints de DFP. Comme toujours, cette approche doit être adaptée en fonction des symptômes, des objectifs et des besoins individuels.
+RÉFÉRENCES
RÉFÉRENCES CITÉES
- Barton CJ, Lack S, emmings S, Tufail S, Morrissey D. The 'Best Practice Guide to Conservative Management of Patellofemoral Pain': incorporating level 1 evidence with expert clinical reasoning. Br J Sports Med. 2015 Jul;49(14):923-34. doi: 10.1136/ bjsports-2014-093637. Epub 2015 Feb 25. PMID: 25716151.
- Lack S, Barton C, Sohan O, Crossley K, Morrissey D. Proximal muscle rehabilitation is effective for patellofemoral pain: a systematic review with meta-analysis. Br J Sports Med. 2015 Nov;49(21):1365-76. doi: 10.1136/bjsports-2015-094723. Epub 2015 Jul 14. PMID: 26175019.
- Esculier JF, Bouyer LJ, Dubois B, Fremont P, Moore L, McFadyen B, Roy JS. Is combining gait retraining or an exercise programme with education better than education alone in treating runners with patellofemoral pain?A randomised clinical trial. Br J Sports Med. 2018 May;52(10):659-666. doi: 10.1136/bjsports-2016-096988. Epub 2017 May 5. PMID: 28476901.