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Effets de type catastrophisation sur le patient et le chirurgien de la formulation des résultats d'IRM et bénéfices d'une reformulation : résultats d'un ERC et d'essais en aveugle

Une analyse de Ben Cormack info

POINTS CLÉS

  1. Les IRM peuvent conduire à une plus grande utilisation des soins de santé, mais sans amélioration des résultats.
  2. La modification de la formulation des résultats d'IRM afin d'inclure un élément qui rassure a eu un effet positif important en comparaison avec une déclaration factuelle des résultats.
  3. La modification de la terminologie des IRM a eu un effet sur le comportement des professionnels de santé à l'égard des interventions.

CONTEXTE ET OBJECTIFS

La chirurgie de la colonne lombaire est plus fréquemment utilisée pour traiter la lombalgie (LBP), et le recours à la chirurgie a reflété une augmentation de l'utilisation de l'imagerie par résonance magnétique (IRM). Malgré des résultats comparables à un an (1), il a été démontré que préférer le recours à l'IRM au détriment de la radiographie pour évaluer une lombalgie entraine trois fois plus de chirurgies de la colonne vertébrale. De plus, les patients qui n'ont pas passé d'IRM ont des résultats similaires à ceux qui en font une et cela aussi bien à court et qu'à long terme (2).

L'IRM a été associée à un effet nocebo potentiellement dû à une terminologie alarmante. Les résultats d'IRM rédigés sans connaissance clinique du patient peuvent potentiellement contribuer à des interventions invasives pour normaliser d'éventuelles anomalies de la colonne vertébrale. L'influence négative des IRM sur les patients n'a pas été formellement étudiée. Par conséquent, le but de cette publication était de :

  • Étudier l'effet des résultats d'IRM routinier sur la perception du patient et les résultats du traitement.
  • Concevoir une méthode clinique de rédaction des résultats d'IRM en évitant les mots et les expressions qui pourraient provoquer une peur et une catastrophisation chez les patients.
  • Réaliser une étude en aveugle pour évaluer l'effet d'une telle reformulation des résultats d'IRM sur la perception de l'état de la colonne vertébrale et la prise de décision.

Il a été démontré que préférer le recours à l'IRM au détriment de la radiographie pour évaluer une lombalgie entraine trois fois plus de chirurgies de la colonne vertébrale.
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La manière dont les résultats d'IRM sont décrits aux patients semble avoir un effet important sur les résultats à 6 semaines à la suite d'un programme de soins conservateurs.

MÉTHODE

L'étude s'est déroulée en trois phases :

Phase 1

44 patients atteints de lombalgie chronique mécanique non spécifique d'au moins 12 semaines ont été randomisés en deux groupes. Le groupe A (n = 21) a reçu une explication factuelle complète des pathologies retrouvées à l'IRM. Le groupe B (n = 23) a été rassuré en disant que l'IRM était tout à fait normale avec seulement des résultats fortuits et liés à l'âge. Aucun patient n'avait de pathologies significatives à l'IRM. Les critères d'évaluation utilisés étaient la sévérité de la douleur à l'EVA, le pain self-efficacy questionnaire (PSEQ) et le SF-12 pour mesurer le niveau de fonction. Les groupes ont ensuite été comparés à 6 semaines après un traitement conservateur similaire.

Phase 2

Une autre méthode de formulation des résultats à l'IRM a été mise au point en évitant les termes qui suscitaient des inquiétudes ou de l'anxiété. Une recherche Google a été utilisée pour identifier les termes auxquels les patients pouvaient avoir accès.

Phase 3

20 résultats d'IRM ont été transmis à la fois sous la forme classique factuelle, soit avec une reformulation alternative. L'effet de cette reformulation a ensuite été testé sur quatre catégories de professionnels de la santé (10 professionnels pour chaque catégorie:chirurgiens de la colonne vertébrale (SS), chirurgiens orthopédistes généraux (OS), residents [éq. internes] en orthopédie (OR) et kinésithérapeutes (PT)). Ces cliniciens ont été mis en aveugle concernant l'évaluation de la gravité de la maladie de la colonne vertébrale, puis ont évalué leur choix de traitement entre le traitement conservateur, l'infiltration et la chirurgie ; et la probabilité de nécessiter une intervention chirurgicale.

RÉSULTATS

Phase 1

Pour l'EVA et le PSEQ, la taille de l'effet entre le groupe A (rapport factuel) et le groupe B (réconfort) était importante en faveur du groupe réconfort [reassurance] après le programme de soins conservateurs de 6 semaines. À 6 semaines, la taille de l'effet inter-groupes pour l'EVA était de 2,8499 et de 2,998 pour la PSEQ. Cette grande différence entre les groupes en faveur du groupe réconfort était due à la détérioration des scores du groupe A au cours de la période de 6 semaines, et parallèlement à l'amélioration des scores du groupe B.

Les auteurs décrivent le PSEQ comme une mesure de la perception négative de la maladie, mais la définition stricte du PSEQ mesure la confiance dans la capacité de la personne à effectuer des activités malgré la douleur. Par conséquent, il pourrait être estimé que la perception de la personne de son corps et de sa douleur s'est aggravée suite à l'exposition au rapport d'IRM factuel (3).

Phase 2

Une autre formulation des résultats évitant les termes potentiellement problématiques sans perdre les résultats importants et cliniquement pertinents a été développée en utilisant un libellé plus scientifique. Cela comprenait : la classification de Pfirrmann modifiée pour remplacer les termes dégénérescence [degeneration], déshydratation [dehydration], dessiccation [desiccation] discale et protrusion [bulge] ; la classification de Schizas pour la sténose lombaire ; zone à haute intensité [high intensity zone] (HIZ) pour les déchirures et fissures annulaires ; «proximité immédiate sans compression» pour indiquer une encoche/indentation [indentation] / un conflit [impingement] ou une juxtaposition [abutment] de la racine nerveuse.

Phase 3

Les 3 éléments - évaluation de la gravité de la pathologie rachidienne ; choix du traitement entre traitement conservateur, infiltration et chirurgie ; et la probabilité perçue de nécessiter une intervention chirurgicale - ont été jugés différemment selon le type de formulation des résultats (formulation habituelle ou reformulation) sur une même IRM d'un même patient.

LIMITES

Cette étude a utilisé une conception d'étude monocentrique et pourrait donc aller plus loin avec le recours à un essai multicentrique plus large pour reproduire les résultats dans une population plus large et réduire le biais des observateurs.

IMPLICATIONS CLINIQUES

Les implications cliniques de cet article sont claires pour la première phase de cette étude. La manière dont les résultats d'IRM sont décrits aux patient·e·s semble avoir un effet important sur les résultats à 6 semaines à la suite d'un programme de soins conservateurs. La mesure du critère d'évaluation principal PSEQ était le double de la différence minimale cliniquement pertinente à 6 semaines.

Les deuxième et troisième phases apportent un éclairage intéressant sur le comportement des professionnels de santé vis-à-vis de la formulation des IRM, avec une diminution du caractère invasif de l'approche proposée suite à la reformulation des résultats d'IRM. Cela montre que ce ne sont pas seulement les patients, mais aussi les professionnels de santé qui sont influencés par la manière dont la terminologie est utilisée dans les soins de santé.

Pour les clinicien·ne·s, aider les patients à comprendre la signification et les implications des résultats d'IRM peut être un aspect clé d'une bonne prise en charge. Cela peut impliquer des explications de la terminologie, s'attarder sur les préoccupations des patients et également mettre en évidence la fréquence de résultats similaires dans les populations asymptomatiques. Ces résultats doivent également être corrélés avec l'évaluation clinique et non interprétés isolément, conformément à la compréhension multifactorielle moderne des pathologies douloureuses de la colonne vertébrale.

+RÉFÉRENCES

Rajasekaran S, Dilip Chand Raja S, Pushpa B, Ananda K, Ajoy Prasad S & Rishi M (2021) The catastrophization effects of an MRI report on the patient and surgeon and the benefits of 'clinical reporting': results from an RCT and blinded trials. European spine journal: Advance online publication.

RÉFÉRENCES CITÉES

  1. Verrilli D, Welch HG (1996) The impact of diagnostic testing on therapeutic interventions. JAMA 275:1189–1191
  2. Chou R, Fu R, Carrino JA, Deyo RA (2009) Imaging strategies for low-back pain: systematic review and meta-analysis. Lancet.
  3. Nicholas MK. The pain self-efficacy questionnaire: Taking pain into account. Eur J Pain. 2007 Feb;11(2):153-63. doi: 10.1016/j.ejpain.2005.12.008. Epub 2006 Jan 30. PMID: 16446108.
En collaboration avec l'Agence EBP
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