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- Numéro 19
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Le renforcement est aussi efficace que les étirements pour améliorer l'amplitude des mouvements : une revue systématique et méta-analyse
POINTS CLÉS
- L'optimisation de l'extensibilité musculaire et de l'amplitude des mouvements articulaires est l'un des objectifs de nombreux programmes de rééducation et d'exercices.
- Cette revue a révélé que le renforcement est aussi efficace que les étirements pour améliorer les amplitudes de mouvement.
- Les changements dans l'amplitude des mouvements articulaires impliquent des adaptations physiologiques, structurelles et neurologiques.
CONTEXTE ET OBJECTIFS
L'optimisation de l'amplitude des mouvements musculaires et articulaires (actifs/passifs) semble être un objectif commun à presque toutes les populations, indépendamment de l'âge, de l'effort physique ou des antécédents de blessures. L'amélioration des amplitudes se produit grâce à un certain nombre d'adaptations physiologiques, structurelles et neurologiques, comme la tolérance accrue à l'étirement, une augmentation de la longueur des faisceaux, des modifications de l'angle de pennation et une activité réflexe tonique réduite (1, 2, 3).
Les études comparant le renforcement (strength training, ST) aux étirements et qui tentent d'évaluer les effets sur l'amplitude présentent des preuves contradictoires et laissent de nombreuses questions sans réponse. Des amplitudes de mouvement réduites et une faiblesse musculaire peuvent être observées dans de nombreuses pathologies musculosquelettiques courantes, ce qui amène la question suivante : les patients devraient-ils passer plus de temps à s'étirer ou à se renforcer ?
S'il est clair que le ST a une plus grande influence sur la force, l'équilibre et la fonction, on ne sait pas encore s'il peut également aider à améliorer les amplitudes autant que les étirements (4). Le but de cet article était de comparer les effets sur les amplitudes du ST à ceux de l'étirement dans un groupe hétérogène de participant·e·s à travers une multitude d'études.
Un renforcement progressif grâce à une augmentation graduelle des amplitudes peut entrainer une amélioration de la fonction plus rapidement que la mise en place d'étirements isolés.
MÉTHODE
Les auteur·e·s ont effectué une revue systématique et une méta-analyse en utilisant la méthode PRISMA. Suite à un processus de sélection rigoureux, les auteur·e·s ont pu identifier 11 articles avec un total de 452 participant·e·s éligibles. Les articles sélectionnés discutaient des amplitudes (prises avec différentes méthodes de mesures actives et passives) de la hanche, du genou, de l'épaule, du coude, du tronc et de la colonne cervicale.
RÉSULTATS
Dans 7 articles sur 11, les groupes ST et les groupes étirements ont considérablement amélioré leurs amplitudes, et les différences entre les groupes étaient non significatives. Dans un article, le ST a considérablement amélioré les mesures des amplitudes, et les étirements dynamiques n'ont pas conduit à une amélioration des amplitudes. Dans un autre article, le ST a donné une plus grande amélioration des amplitudes actives par rapport à l'étirement, mais les différences entre les groupes étaient non significatives pour les amplitudes actives. Et dans deux articles, ni le ST ni les étirements ne se sont avérés entrainer des améliorations significatives des amplitudes.
Aucun des articles n'a démontré de différence des amplitudes en fonction du sexe. Le ST et les étirements ont toujours favorisé des gains d'amplitudes, mais il n'y avait pas d'avantage clair de l'un par rapport à l'autre. Globalement, l’ensemble des résultats n'a pas indiqué une recommandation claire en faveur du ST par rapport à l'étirement dans l'amélioration des amplitudes.
LIMITES
Le risque de biais s'est avéré élevé dans 5 des articles, en raison d'écarts par rapport aux interventions prévues, de données manquantes sur les résultats et de résultats rapportés insuffisants. Au contraire, le risque de biais était faible dans les 6 autres articles. Comme prévu, il y avait une forte hétérogénéité entre les articles analysés, ce qui a entrainé des recommandations non spécifiques sur les étirements par rapport au renforcement musculaire.
Des recherches futures sont nécessaires pour effectuer des analyses de sous-groupes sur des populations spécifiques. Des données plus détaillées sont nécessaires sur le degré d'étirement, le volume, l'intensité et la fréquence du ST. Une relation dose-réponse doit encore être établie en ce qui concerne l'effet du ST sur les amplitudes.
IMPLICATIONS CLINIQUES
Les résultats de cette revue indiquent que le ST est tout aussi efficace que l'étirement pour améliorer les amplitudes. Bien que les deux interventions ne démontrent pas de différences significatives dans leur effet sur les amplitudes, il subsiste tout de même des éléments solides en faveur du ST par rapport à l'étirement dans le dosage des exercices thérapeutiques en pratique quotidienne. Il existe de nombreux cas où le ST offre un bénéfice global plus important que l'étirement en raison de ses nombreux avantages. Les adaptations associées au ST non observées avec les étirements comprennent notamment une amélioration de la masse musculaire, une augmentation de la masse osseuse, une diminution du risque de blessure, une diminution du risque de chute et une augmentation de la vitesse de marche (5, 6, 7).
Les patient·e·s présentant des amplitudes fortement diminuées en raison d'une blessure ou d'un dérangement articulaire sont souvent faibles et déconditionné·e·s (8). Par exemple, une personne après une opération du LCA avec un manque d'extension a très probablement des déficits de force du quadriceps et de la conduction nerveuse ; et un manque d'extensibilité des ischio-jambiers après une élongation de stade II sera très probablement accompagné d'une faiblesse musculaire. Un ST correctement dosé et progressif grâce à une augmentation graduelle des amplitudes et selon la tolérance peut entrainer une amélioration de la fonction et un retour au niveau de fonction antérieur plus rapidement que la mise en place d'étirements isolés.
Les variables du ST doivent faire l'objet d'une progression méthodique, en accordant une attention particulière à la relation longueur-tension et à la contrainte totale sur le groupe musculaire, la position de l'articulation, le type de contraction, la vitesse de contraction, le volume, la fréquence et l'intensité relative de l'exercice. Dans un contexte clinique, notamment dans une population blessée, de nombreux exercices devront probablement être modifiés afin de tenir compte des sensibilités, des intolérances à la position ou à certains mouvements. En raison de l'impact similaire sur les amplitudes et de l'avantage évident d'améliorer de nombreuses autres capacités physiologiques, le ST semble être une intervention clinique supérieure pour les cas où il y a des déficits d'amplitudes.
+RÉFÉRENCES
RÉFÉRENCES CITÉES
- Sharman MJ, Cresswell AG, Rie S. (2006). Proprioceptive neuromuscular facilitation stretching: mechanisms and clinical implications. Sports medicine.
- Kudo S, Sato T, Miyashita T. (2020). Effect of plyometric training on the fascicle length of the gastrocnemius medialis muscle. J Phys Ther Sci.
- Guissard N, Duchateau J. (2004). Effect of static stretch training on neural and mechanical properties of the human plantar-flexor muscles. Muscle Nerve.
- Morton SK, Whitehead JR, Brinkert RH, Caine DJ. (2011). Resistance training vs. static stretching: effects on flexibility and strength. J Strength Cond Res.
- Lauersen JB, Andersen TE, Andersen LB. (2018). Strength training as superior, dose-dependent and safe prevention of acute and overuse sports injuries: a systematic review, qualitative analysis and meta-analysis. Br J Sports Med.
- Lee IH, Park SY. (2013). Balance improvement by strength training for the elderly. J Phys Ther Sci.
- Nicholson VP, McKean MR, Burkett BJ. (2015). Low-load high-repetition resistance training improves strength and gait speed in middle-aged and older adults. J Sci Med Sport.
- Trakis JE, McHugh MP, Caracciolo PA, Busciacco L, Mullaney M, Nicholas SJ. (2008). Muscle strength and range of motion in adolescent pitchers with throwing-related pain: implications for injury prevention. Am J Sports Med.