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Recommandations pour la récupération de la fonction des ischio-jambiers après une plastie du LCA
POINTS CLÉS
- L'accent mis au début sur le renforcement du quadriceps dans la rééducation du LCA peut potentiellement prendre le dessus sur le besoin de renforcement des ischio-jambiers.
- Le déficit de force en flexion de genou peut jouer un rôle important dans la récidive de lésion du LCA et devrait être mesuré plus attentivement pendant le processus de prise de décision de reprise du sport.
- Le renforcement des ischio-jambiers pendant la rééducation du LCA devrait inclure des exercices à des courses musculaires courtes et longues, une combinaison d'extension de hanche et de flexion du genou, une attention particulière sur la force excentrique en course externe et la course à pied à grande vitesse.
CONTEXTE ET OBJECTIFS
Des déficits importants de la fonction des ischio-jambiers ont été rapportés dans la période postopératoire précoce à la suite d'une plastie du ligament croisé antérieur (LCA), ainsi que dans la période de reprise du sport (Return To Sport, RTS) (1). Bien que les déficits de force des ischio-jambiers soient plus importants chez ceux·celles qui ont subi une autogreffe du tendon des ischio-jambiers (AIJ), ils sont toujours très préoccupants chez ceux·celles qui ont subi une autogreffe du tendon patellaire (ATP).
L'accent mis au début sur le renforcement du quadriceps dans la rééducation du LCA peut potentiellement prendre le dessus sur le besoin de renforcement des ischio-jambiers. Des déficits en flexion de genou et de force d'extension de hanche peuvent être préjudiciables et augmenter le risque de blessure lors de la RTS, soulignant la nécessité de se concentrer continuellement sur la chaine postérieure pendant la rééducation du LCA (2).
Le but de cet article était de discuter des altérations importantes des muscles ischio-jambiers après une plastie du LCA (pLCA), d'examiner leurs implications sur la conception du programme [de rééducation] et de guider les clinicien·ne·s sur la façon d'appliquer ces informations.
Le renforcement des ischio-jambiers pendant la rééducation du LCA doit être découpé en phases et soigneusement planifié, exposant les patient·e·s à des courses musculaires, intensités et vitesses croissantes au fil du temps.
MÉTHODE
Les auteur·rice·s ont écrit un article de synthèse en utilisant 217 publications sur une variété de sujets en lien avec la pLCA, les atteintes des ischio-jambiers et les membres inférieurs. Cet article présente un exemple de modèle de rééducation post pLCA, un exemple avec une périodisation de la progression grâce à la prescription d'exercice, et de nombreuses citations issues d'une multitude d'articles avec différents niveaux de preuves.
RÉSULTATS
Les déficits des fléchisseurs du genou après pLCA sont généralement plus prononcés à des courses musculaires plus courtes. En tant que muscle à bi-articulaire, les ischio-jambiers sont raccourcis au maximum lorsque la hanche est en extension et le genou en flexion, comme lors du hamstring curl debout [flexion du genou debout] (3). À 6 mois post-opératoire, 67 % des patient·e·s ayant subi une ATP avaient un limb symmetry index de la flexion du genou (LSI)> 90 %, alors que seulement 46 % des patient·e·s ayant subi une AIJ ont atteint cette symétrie (4). Le recours à une AIJ peut entrainer une inhibition neuromusculaire chronique et des déficits persistants de la force des ischio-jambiers encore plus prononcés lors d'une activation excentrique que lors d'une activation concentrique (5). Après une pLCA avec une AIJ, il semble également y avoir une migration proximale de la jonction muscle-tendon du semi-tendineux, qui peut prendre jusqu'à 18 mois pour se réparer, et peut ne jamais être complètement réparée chez jusqu'à 50 % des patient·e·s (6).
Les preuves suggèrent que l'entrainement à des courses musculaires plus longues peut produire des gains de force et des changements de la structure musculaire similaires à l'entrainement excentrique, indiquant une utilité potentielle d'un entrainement des ischio-jambiers en course plus externe pendant la rééducation post pLCA (7). On pense que les exercices des ischio-jambiers exécutés avec la hanche fléchie ont une plus grande correspondance dynamique avec les exigences fonctionnelles des ischio-jambiers lors de la locomotion. Pendant la phase d'oscillation du sprint, les moments [de force] internes à la hanche sont le double de ceux du genou, ce qui indique un besoin de renforcement et de coordination proximal de la hanche, du bassin et du tronc afin de garantir le maintien d'une bonne relation longueur-tension des ischio-jambiers (8).
LIMITES
Cet article se présente comme une revue générale. Il lui manque une approche systématique de la sélection des articles et ne comporte aucune puissance statistique. Bien qu'informatif, cet article présente un faible niveau de preuves et n'était pas destiné à servir de guide de pratique clinique ou de mise à jour fondamentale de notre compréhension actuelle.
IMPLICATIONS CLINIQUES
Le renforcement fonctionnel des ischio-jambiers devrait être un élément clé de toute rééducation du LCA, avec une attention particulière accordée aux personnes ayant subi une AIJ. Les ischio-jambiers ont gagné le titre d' "homologues musculaires du LCA". En effet, la contraction musculaire de ces derniers contribue effectivement à la stabilité du genou en résistant à la translation antérieure et à la rotation excessive du tibia. Le rôle combiné des ischio-jambiers dans l'extension de hanche et la flexion de genou, et leur besoin de développer une force excentrique rapide à des courses musculaires plus externes pendant le sprint et les tâches fonctionnelles, devraient aider les clinicien·ne·s à élaborer leur programme et à faire progresser les exercices des ischio-jambiers de leur patient·e.
Les exercices des ischio-jambiers peuvent être classés en fonction de leur type de contraction prédominant, de leur vitesse de contraction, de leur course musculaire et de leur position articulaire. Des exercices avec des courses musculaires plus courtes peuvent être préférables au début de la période postopératoire, comme des prone leg curl [flexion de genou en procubitus], des standing leg curl, et des ponts fessiers. Au cours des étapes ultérieures, l'exercice du nordique pour les ischio-jambiers [Nordic hamstring exercise] constitue un exercice avec une course musculaire faible axé sur la force excentrique maximale. Des exercices avec une course musculaire plus externe qui intègrent des schémas de mouvement au niveau de l'articulation de la hanche renforcent davantage les fibres proximales des ischio-jambiers. On peut citer le soulevé de terre à la Roumaine [Romanian deadlift], l'extension du dos à 45 degrés et le kettlebell swing [action de faire balancer la kettlebell]. Des exercices avec une course musculaire plus externe qui intègrent à la fois l'extension de hanche et la flexion du genou, tels que le straight leg bridge [pont fessier jambes tendues] et le seated leg curl [flexion de genou assis], ont la capacité d'améliorer la longueur des faisceaux musculaires et de contribuer à des gains de force excentriques à des courses musculaires plus externes.
Le sprint est sans doute l'exercice le plus efficace pour les ischio-jambiers, car il incorpore des vitesses angulaires rapides et des exigences élevées à la fois en extension de hanche et en flexion de genou et il dispose de la plus grande transférabilité aux performances sportives pour les athlètes de terrain. Une multiplication par deux de l'activation des ischio-jambiers a été rapportée entre le sprint à 7 m/s et 9 m/s, indiquant en outre la nécessité d'un sprint à vitesse maximale pour des adaptations spécifiques des ischio-jambiers.
Le renforcement des ischio-jambiers pendant la rééducation du LCA doit être découpé en phases et soigneusement planifié, exposant les patient·e·s à des courses musculaires, intensités et vitesses croissantes au fil du temps. Un large éventail d'exercices des ischio-jambiers et de course à grande vitesse doit être mis en œuvre pendant la rééducation du LCA afin de réduire le risque de récidive et d'optimiser les performances de la RTS.
+RÉFÉRENCES
RÉFÉRENCES CITÉES
- Cristiani R, Mikkelsen C, Forssblad M, Engström B, Stålman A. (2019). Only one patient out of five achieves symmetrical knee function 6 months after primary anterior cruciate ligament reconstruction. Knee surgery, sports traumatology, arthroscopy.
- Kim HJ, Lee JH, Ahn SE, Park MJ, Lee DH. (2016). Influence of Anterior Cruciate Ligament Tear on Thigh Muscle Strength and Hamstring-to-Quadriceps Ratio: A Meta-Analysis. PloS one.
- Baumgart C, Welling W, Hoppe MW. (2018). Angle-specific analysis of isokinetic quadriceps and hamstring torques and ratios in patients after ACL-reconstruction. BMC Sports Sci Med Rehabil.
- Harput G, Kilinc HE, Ozer H, Baltaci G, Mattacola CG. (2015). Quadriceps and Hamstring Strength Recovery During Early Neuromuscular Rehabilitation After ACL Hamstring-Tendon Autograft Reconstruction. Journal of sport rehabilitation
- Opar DA, Williams MD, Timmins RG, Hickey J, Duhig SJ, Shield AJ. (2015). Eccentric hamstring strength and hamstring injury risk in Australian footballers. Med Sci Sports Exerc.
- Tengman E, Brax Olofsson L, Stensdotter AK, Nilsson KG, Häger CK. (2014). Anterior cruciate ligament injury after more than 20 years. II. Concentric and eccentric knee muscle strength. Scand J Med Sci Sports.
- Bourne, MN, Duhig SJ, Timmins RG, Williams MD, Opar DA, Al Najjar A, Kerr GK, Shield AJ. (2017). Impact of the Nordic hamstring and hip extension exercises on hamstring architecture and morphology: implications for injury prevention. BJSM
- Mendiguchia J, Alentorn-Geli E, Brughelli M. (2012). Hamstring strain injuries: are we heading in the right direction? BJSM.
- Shin CS, Chaudhari AM, Andriacchi TP. (2011). Valgus plus internal rotation moments increase anterior cruciate ligament strain more than either alone. Med Sci Sports Exerc.