Exercices pour le syndrome de stress tibial médial (alias « la périostite »)

9 mins de lecture. Posté dans Jambe
Un article de Tom Goom info

Il est facile de parler de rééducation en termes généraux — « renforcer X, Y ou Z », « améliorer le contrôle moteur », etc. — mais nous détaillons rarement ce que cela signifie concrètement. Le billet d’aujourd’hui propose un bref aperçu d’un programme d’exercices que j’ai utilisé avec un patient atteint du syndrome de stress tibial médial (SSTM), ainsi que des raisons qui m’ont conduit à le structurer de cette façon.

Le patient dans ce cas est un jeune coureur de demi-fond nommé Ben. À ce jour, il ne ressent plus aucune douleur dans ses activités quotidiennes et peut courir jusqu’à 40 minutes sans symptômes. Il a bien progressé depuis la première séance, où même le footing sur place était douloureux. Cependant, les sorties de plus de 45 minutes provoquent encore une légère gêne au niveau du tibia en médial. Il s’agit d’un problème récurrent, et l’objectif de Ben est de reprendre un entraînement complet, sans symptômes. Il réintroduit progressivement des séances à haute intensité sous les conseils de son entraîneur, et gère bien cette reprise. L’évaluation met en évidence une légère faiblesse du soléaire, des muscles fessiers et de la chaîne postérieure. Le contrôle de l’équilibre et des inclinaisons en appui unipodal est bon et symétrique. Ben travaille avec un préparateur physique et se rend à la salle trois fois par semaine. Il souhaite disposer d’une sélection d’exercices ciblés à intégrer dans son entraînement.

Dans les grandes lignes, nos objectifs sont les suivants :

  • Améliorer la capacité de charge locale dans le complexe du mollet,
  • Améliorer la capacité de charge de la chaîne cinétique en tenant compte des muscles clés qui aident à gérer la charge,
  • Inclure des exercices de mise en charge pour améliorer la capacité de charge osseuse,
  • Progresser en ajoutant du poids et/ou de l’impact, car cela est plus susceptible de stimuler l’adaptation osseuse.

Le programme de Ben se présente donc comme suit :

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Passons en revue chaque exercice.

1. Montées de step

Simple mais très efficace ! Les montées de step permettent d’atteindre des niveaux élevés d’activité du grand fessier (Reiman et al. 2012), tout en faisant travailler le moyen fessier et en fournissant un effort proprioceptif. Les muscles fessiers sont essentiels pour absorber la charge pendant la phase d’appui de la course. Cet exercice est le premier à réaliser en raison de sa dimension de contrôle ; le faire une fois fatigué par les autres exercices peut compromettre la qualité du mouvement. Il est facile de progresser ou de s’adapter aux besoins changeants des patients en augmentant la hauteur des marches ou en ajoutant une charge.

2. Fente avec activation du soléaire

Cet exercice est une bonne option isométrique qui sollicite à la fois le soléaire et le quadriceps, deux muscles essentiels pour absorber la charge pendant la course. Hamner et al. (2010) ont constaté que le quadriceps était le muscle qui contribuait le plus à l’appui. Dans le cadre du SSTM, le soléaire est considéré comme particulièrement important, car il contribue à réduire le moment de flexion subi par le tibia lors de l’impact, ce qui est considéré comme un facteur clé dans le développement des lésions de stress osseux (Warden et al., 2014).

3. Soulevé de terre roumain (RDL) unilatéral

Des travaux récents (Collings et al., 2023) ont démontré qu’un RDL unilatéral sollicite l’ensemble des muscles fessiers — grand, moyen et petit. Il engage également les ischio-jambiers et stimule le contrôle postural, ce qui présente de nombreux avantages potentiels.

4. Élévation unilatérale des mollets

Les élévations des mollets, réalisées genoux fléchis ou tendus, sont des exercices simples et efficaces pour renforcer le triceps sural, principal amortisseur des chocs au niveau du pied et de la cheville. Étant donné que ce complexe musculaire est fortement sollicité lors de la course, il est souvent nécessaire de dépasser la simple charge corporelle en y ajoutant un poids externe. Ben fait partie des coureurs qui attaquent avec l’avant-pied, et la littérature montre que cette stratégie entraîne des charges plus importantes sur le triceps sural (Almonroeder et al., 2013). Nous voulons donc nous assurer qu’il dispose d’une force suffisante pour supporter cette contrainte.

5. Abduction avec swiss ball

L’évaluation de Ben a mis en évidence une faiblesse des muscles fessiers, que nous souhaitons corriger. L’utilisation d’un swiss ball permet de mieux recruter le grand fessier tout en limitant les compensations liées à la flexion de hanche. Nous avons déjà inclus des exercices en charge, comme le RDL et les montées de step, qui sollicitent les fessiers en synergie avec d’autres groupes musculaires. L’objectif ici est d’isoler davantage les fessiers et de les travailler jusqu’à la fatigue afin de combler le déficit de force observé chez Ben. J’intègre cet exercice en fin de séance, car une fois que vous avez travaillé les fessiers jusqu’à l’épuisement, le contrôle moteur sur les autres exercices devient nettement plus difficile !

6. Pliométrie sans douleur

Le syndrome de stress tibial médial est considéré comme une lésion osseuse. Selon les recommandations actuelles, ce type de blessure ne doit pas entraîner de douleur pendant ni après l’exercice (Warden et al., 2021). Cela est particulièrement crucial pour les exercices avec impact, souvent les plus provocateurs. La pliométrie peut être intégrée dans une séance dédiée ou placée en début de séance de renforcement, à condition qu’elle soit bien tolérée. Il est recommandé de commencer par un échauffement pour préparer le corps aux contraintes de l’impact.

Malgré le risque potentiel d’irritation, les exercices pliométriques sont très efficaces pour stimuler l’adaptation osseuse et améliorer la tolérance à la charge. En cas de lésion de stress osseux, on privilégie généralement des efforts explosifs de courte durée, entrecoupés de périodes de repos. Au départ, le volume peut être limité à 40 contacts au sol ou moins par séance. L’intensité peut ensuite être augmentée — si cela est sûr et adapté au patient, et en l’absence de douleur — en jouant sur la vitesse d’exécution, la hauteur ou la longueur des sauts, la charge externe, ou encore le changement de direction.

Le nombre total de contacts au sol peut rester relativement faible lors de la rééducation d’une lésion osseuse (par exemple, entre 40 et 80), car la capacité de l’os à s’adapter à la charge atteint rapidement un seuil de saturation. Au-delà de ce seuil, un plus grand nombre de cycles de charge n’entraîne pas nécessairement une adaptation osseuse accrue. Pour en savoir plus, consultez notre graphique ci-dessous sur les quatre principes de la charge osseuse, tiré de Running Repairs Online.

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Autres considérations

Nous avons fourni à Ben des repères concernant les répétitions et les séries, tout en lui recommandant de travailler jusqu’à la fatigue à chaque série. Le nombre de répétitions se situe actuellement entre 8 et 12. La fatigue est utilisée comme indicateur pour s’assurer que la charge est suffisante. Si Ben n’atteint pas cet état dans la plage prévue, il doit augmenter la difficulté de l’exercice en ajoutant de la charge, en amplifiant l’amplitude du mouvement ou en prolongeant le temps sous tension. Nous lui avons également suggéré d’alterner les jambes : travailler jusqu’à la fatigue sur la jambe droite, puis passer à la jambe gauche pendant que la première récupère.

La communication joue ici un rôle essentiel : Ben est satisfait des exercices proposés et comprend comment progresser pour chacun d’eux. Nous avons également échangé avec son préparateur physique et tenu son entraîneur de course informé de ses progrès et de sa tolérance à la charge, afin de travailler ensemble au sein d’une équipe intégrée.

Comme mentionné dans l’image ci-dessus, il ne s’agit pas d’une recette universelle pour le traitement du syndrome de stress tibial médial, mais d’un aperçu des exercices sélectionnés pour un patient donné, et des raisons de ces choix. La rééducation de Ben est réévaluée, ajustée et optimisée à chaque séance. Elle s’inscrit dans un programme de prise en charge global, incluant l’éducation de l’athlète, la rééducation de la marche, et un retour progressif à la course.

Nous avons collaboré avec les préparateurs physiques et les entraîneurs de course de Ben afin d’élaborer un programme permettant une récupération optimale entre les séances de musculation, de pliométrie et de course.

En conclusion : la prescription d’exercices pour le SSTM ou d’autres blessures doit être individualisée, en tenant compte du comment, du quand et du où le patient effectuera sa rééducation. Il est également essentiel qu’il comprenne pourquoi il fait ces exercices et en quoi ils l’aideront à atteindre ses objectifs. Tous les patients ne souhaitent pas un programme complexe ; dans de nombreux cas, 3 ou 4 exercices clés peuvent s’avérer très efficaces. Si vous prescrivez des exercices, essayez de suivre vous-même l’un des programmes que vous avez proposés pendant une semaine — c’est bien plus difficile qu’il n’y paraît !

Et voici mon point final, mais essentiel : prescrire des exercices, c’est une question de raisonnement, pas de recettes toutes faites !

Cet article est fourni à titre informatif uniquement et ne remplace pas un avis médical. Il a été rédigé par Tom Goom. Pour découvrir d’autres ressources d’expert et en apprendre davantage, consultez son site internet : Running Physio.

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