Comment mieux prendre en charge le conflit sous-acromial – avec Jo Gibson

6 mins de lecture. Posté dans Épaule
Un article de Dr Jahan Shiekhy info

Le conflit sous-acromial est un des motifs poussant de nombreux patients à consulter un kinésithérapeute. Cependant, les avis divergents sur les causes de la douleur d’épaule ainsi que la mauvaise adhérence aux programmes d’exercices peuvent rendre la prise en charge de ces douleurs difficile. On s’est donc entretenus avec l’experte de la rééducation de l’épaule Jo Gibson. Jo Gibson est une kinésithérapeute au Royal Liverpool Hospital au Royaume-Uni et une conférencière internationale de renom au sujet de la rééducation de l’épaule. Ces propos sont tirés de sa participation à notre podcast Physio Explained (épisode 16) (En anglais), qui vous permet d’apprendre des meilleurs spécialistes en 20 minutes ou moins. Cette conversation aborde trois aspects de la rééducation de l’épaule : la façon dont nous parlons de la douleur à l’épaule, son évaluation et son traitement.

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Une mise à jour de notre discours sur la douleur d’épaule

Comme pour d’autres syndromes douloureux, le modèle initial du « conflit sous-acromial » reposait sur un modèle biomécanique. La théorie stipulait que la compression des tissus mous dans l’espace sous-acromial (par exemple, la coiffe des rotateurs, les bourses, etc.) entraînait des douleurs à l’épaule. Cependant, des recherches récentes remettent en question cette théorie et les données de l’imagerie ne montrent pas de corrélation précise avec les symptômes (1, 2). Par ailleurs, il existe également des facteurs psychosociaux liés à l’apparition et à la persistance de la douleur d’épaule, et nous concentrer uniquement sur des facteurs biomécaniques pourrait ainsi nous induire en erreur (3).

Faut-il donc abandonner complètement le terme de « conflit » ? Malheureusement, ce n’est pas si simple. En réalité, de nombreux patients et cliniciens continuent d’utiliser ce terme. Jo Gibson reconnaît que nous pouvons être amenés à utiliser ce terme lorsque nous parlons avec d’autres praticiens et parfois même avec des patients. En ce qui concerne les patients, nous devons déterminer dans quelle mesure leur compréhension de cette étiquette diagnostique influe sur leur réceptivité au traitement kinésithérapique.

Certains patients peuvent simplement entendre ce terme et être prêts à entreprendre une rééducation. D’autres, en revanche, peuvent penser que la kinésithérapie ne pourra rien faire pour empêcher la compression des tissus dans l’espace sous-acromial. Pour ces patients, plutôt que de débattre directement de la question, Jo Gibson recommande d’utiliser votre évaluation pour montrer au patient comment modifier sa douleur. Cette approche « show-then tell » (montrer, puis expliquer) permet d’instaurer la confiance, de renforcer l’alliance thérapeutique et d’améliorer l’observance aux exercices.

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Comment évaluer une douleur d’épaule

Traditionnellement, l’évaluation kinésithérapique de l’épaule comprenait une série de tests spéciaux visant à identifier le tissu mou responsable de la douleur. Cependant, dans le cas d’une douleur d’épaule, nous savons déjà que le patient a mal et ces tests risquent donc d’être provocateurs. De plus, ces tests ne nous indiquent pas de manière fiable quelles structures sont impliquées dans la douleur sous-acromiale (1).

Jo Gibson suggère ainsi plutôt d’évaluer :

  • l’amplitude des mouvements de l’épaule,
  • l’instabilité,
  • l’implication du rachis cervical dans la douleur d’épaule,
  • la mobilité du rachis thoracique,
  • la performance musculaire isolée de la coiffe des rotateurs.

Enfin, Jo Gibson recommande les procédures de modification des symptômes (telles que la modification de la position de la scapula, les schémas d’activation musculaire, etc.). Cela consiste à tester une technique, réessayer le mouvement douloureux, puis demander au patient comment il se sent. Les techniques de soulagement permettent ensuite de guider notre traitement.

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Comment améliorer l’observance aux programmes d’exercices pour l’épaule

L’utilisation d’exercices basés sur des procédures de modification de symptômes améliore l’observance, car le patient peut directement sentir que nous avons amélioré une activité qui lui tient à cœur. Par exemple, j’ai travaillé avec une femme qui souffrait d’une douleur sous-acromiale persistante lorsqu’elle levait la main au-dessus de la tête lors de ses cours de sport. Lors de son évaluation clinique, j’ai effectué une rotation manuelle de sa scapula vers le haut, ce qui lui a permis d’atteindre une position de bras plus élevée avec moins de douleur. Nous avons ensuite essayé le mouvement de flexion en faisant cette fois-ci glisser les mains contre un mur tout en écartant un élastique. La patiente a alors remarqué que cet exercice reproduisait les effets de mon assistance manuelle de rotation de scapula vers le haut.

Il existe des théories biomécaniques permettant d’expliquer pourquoi cet exercice a fonctionné. Quels que soient les mécanismes, ce qui compte, c’est que cette patiente ait eu l’impression que nous avons amélioré un mouvement qui lui était important. Bien sûr, nous pouvons toujours avoir besoin de quelques exercices pour cibler la coiffe des rotateurs sans qu’ils ne correspondent à un mouvement significatif. Cependant, nous devons nous assurer que le patient comprenne comment l’ensemble du programme d’exercices l’aide à retourner aux activités importantes pour lui. Un avantage supplémentaire de ce type d’exercices est que les patients adhèrent plus facilement à des programmes d’exercices non douloureux.

Une autre clé de la fidélité à un programme d’exercices est la limitation du nombre de ces derniers. Pour la population générale, 1 à 3 exercices bien choisis sont probablement suffisants, autrement l’adhésion au programme diminue (4). Jo Gibson ajoute en revanche que les sportifs ont généralement besoin d’un programme plus complet.

 

Conclusion

La douleur sous-acromiale est une affection courante rencontrée en clinique et nous pouvons encourager les patients concernés au travers de l’exercice. Les points clés de ce podcast sont les suivants :

  • Il se peut que nous devions utiliser le terme de « conflit sous-acromial » pour communiquer avec certains praticiens et patients.
  • Nous devons chercher à comprendre ce que signifie cette étiquette diagnostique pour le patient. Si sa compréhension peut avoir un impact sur notre traitement kinésithérapique, nous pouvons adopter une approche « show-then tell ».
  • Les bilans doivent être concis et les tests spéciaux inutiles doivent être évités.
  • Nous devons utiliser des procédures de modification de symptômes pour l’évaluation et le traitement afin de rendre les exercices pertinents.
  • Choisir 1 à 3 exercices pour les patients de la population générale.

 

Pour en savoir plus sur l’évaluation et le traitement de la douleur d’épaule, consultez cet épisode du podcast avec Jo Gibson ici (En anglais).

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Références

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  • Celine Riedweg

    Super blog merci !

    Celine Riedweg | 10 juillet 2023 | 'J'aime'
  • Mandeep Bharaj

    Top article ^^

    Mandeep Bharaj | 04 mai 2023 | 'J'aime'

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