Lésion de la syndesmose : de la recherche à la pratique

8 mins de lecture. Posté dans Cheville
Un article de Ashish Dev Gera info

Si un de vos patients vous a déjà dit « on m’a autorisé à jouer, mais je ne me sens toujours pas prêt », bienvenue dans la zone grise de la rééducation sportive, où les scanners sont bons, où la force semble décente, mais où le cerveau de l’athlète agite toujours un drapeau rouge. Le cas clinique présenté ici plonge dans cette zone grise avec un footballeur de 16 ans de l’académie de Newcastle United, jonglant entre anxiété et ambition.

 

Contexte

Lors d’un déplacement professionnel, j’ai rencontré ce jeune athlète qui faisait une retraite bien-être. Il souffrait depuis quatre mois d’une lésion de la syndesmose survenue lors d’un tacle à fort impact à l’entraînement. Le mécanisme impliquait une flexion dorsale et une rotation latérale forcées avec le pied en appui – une configuration classique pour une lésion de la syndesmose.

Il a suivi une première phase de rééducation au club, comprenant une immobilisation, un travail sur la mobilité et un programme de renforcement progressif. Mais au moment de notre rencontre, il était bloqué dans la zone frustrante du « plus blessé, mais pas confiant ». Faire du jogging ? C’est bon. Des exercices ? C’est fait. Se sentir à nouveau lui-même ? Pas du tout.

 

Pourquoi il est venu me voir

Le jeune athlète m’a rencontré lors de vacances en famille. Ce qui a commencé comme une conversation banale au cours d’un dîner s’est transformé en une consultation complète. Il posait les grandes questions : « Vais-je perdre ma chance d’obtenir un contrat ? Et si cela se reproduit ? Pourquoi est-ce que je me sens encore mal alors que j’ai été autorisé à reprendre ? » Il m’a dit : « Je sais que j’ai de la chance d’être ici, mais je ne peux pas me détendre quand je pense que je ne jouerai peut-être plus jamais de la même façon ». C’est à ce moment-là que j’ai su que nous devions aller au-delà des séries et des répétitions.

Il était clair qu’il ne s’agissait pas seulement de sa cheville. Il s’agissait de la peur, de son identité et de la pression liée à ses attentes futures. Il était très motivé, mais mentalement bloqué, analysant chaque répétition, chaque douleur.

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Évaluation et tests cliniques

Nous avons commencé par :

  • Une analyse de la marche et du mouvement lors d’exercices multidirectionnels,
  • Des tests de saut (triple saut, sauts croisés),
  • Le test d’équilibre en étoile (Star Excursion Balance Test) : on note une asymétrie modérée dans la direction postéro-latérale,
  • Un test d’endurance aux levers de talons + et lever de talon unilatéral : on note une fatigue précoce du côté atteint,
  • Un test SOSFB (Standing on Single Foot Binding) (revue Physio Network) : résultat négatif, ce qui renforce la confiance dans la guérison structurelle.

Nous avons également effectué :

  • Un test d’effort en rotation latérale : légère appréhension, pas de douleur,
  • Un test de compression : négatif.

Cette revue de littérature Physio Network mentionne l’utilité clinique des tests de diagnostic et aide à former le raisonnement clinique.

Il est intéressant de noter que le patient était en demande de Dry Needling, avançant pour argument que cela l’aurait aidé lorsqu’ils en ont fait au club. J’en ai donc profité pour lui expliquer que le Dry Needling pouvait apporter un soulagement temporaire, mais que sa cheville n’avait pas besoin d’être calmée, mais au contraire stimulée. « Tu n’es pas blessé, tu n’es pas assez préparé ».

 

Éducation et soutien

L’un des outils les plus puissants dans ce cas n’a pas été les élastiques ou la pliométrie, mais une conversation. Cette revue de Physio Network montre que les athlètes d’élite reviennent à leur niveau d’avant la blessure après une lésion de la syndesmose.

Nous avons recadré la situation :

  • Sa cheville n’était pas faible, elle était sous-exposée,
  • L’inconfort n’était pas un signe de dommage, mais de déconditionnement,
  • Sa peur n’était pas un défaut, c’était son cerveau qui essayait de protéger ce qui était important.

Il acquiesce et dit : « J’avais besoin que quelqu’un me dise cela. Tous les autres n’arrêtaient pas de me dire : « Tu vas bien maintenant ».

Pour revenir sur le terrain, il ne s’agissait pas seulement de passer des tests de force ou de cocher des cases, mais aussi de faire taire les doutes. Pour de nombreux athlètes, cette première séance réelle de retour sur le terrain a plus de poids émotionnel que l’ensemble du processus de rééducation. Les enjeux sont plus importants, l’esprit s’emballe et le corps se remet en question.

 

Plan de rééducation : la phase de retour au jeu

Nous avons passé dix jours ensemble en personne, suivis de six semaines de téléconsultation. Notre rééducation avait trois objectifs principaux :

  1. Rétablir la tolérance au chaos :
    • Travail multidirectionnel avec consignes sollicitant des réactions rapides,
    • Prise de décision en état de fatigue (exercices avec ballon + sprints),
    • Sauts / bonds avec perturbation du partenaire,
    • Exercices sur surface irrégulière pour simuler des contacts imprévisibles,
    • Exercices d’agilité sur le sable (pour simuler des surfaces variables),
  2. Objectifs de force et de puissance :
    • Levers de talon unipodal jusqu’à la fatigue (objectif : 25+ répétitions ; a commencé à 12 pour le côté blessé),
    • Saut en longueur unilatéral (arrivé à environ 90 % du côté non atteint ; initialement à 78 %),
    • Soulevés de terre à la barre sans douleur à 1,5 fois le poids du corps,
  3. Exposition psychologique :
    • Exercices de visualisation (séances guidées imaginant des scénarios de match),
    • Rédaction d’un journal de réflexions après l’exercice : « Aujourd’hui, j’ai eu l’impression de rejouer au football »,
    • Analyse des scénarios de match avec retour vidéo.

Nous avons respecté la progression naturelle de la cicatrisation des tissus tout en ajoutant de manière créative des défis proprioceptifs – comme des exercices sur une seule jambe avec distraction visuelle ou le contrôle du ballon sous charge cognitive – afin de simuler les imprévus du match et de rétablir la confiance athlétique.

Nous avons également travaillé sur la variabilité de l’environnement :

  • Exercices de transition entre le gazon et l’herbe,
  • Conduite de balle et changement de direction sur sol mouillé,
  • Exercices légers pieds nus sur le sable pour reconditionner les muscles intrinsèques du pied.

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Reculs et ajustements :

Vers la deuxième semaine d’entraînement en téléconsultation, il a signalé une légère raideur antérieure de la cheville après une journée complète d’entraînement et de salle de sport. Nous avons ajusté la charge, introduit un travail de mobilité à faible charge (distraction articulaire avec élastique, travail actif des amplitudes de flexion dorsale sur les genoux) et remplacé les sauts par des exercices axés sur la décélération pendant quelques séances. Il m’a envoyé un message : « J’ai bien fait de ralentir un peu. Je me sens à nouveau plus serein maintenant ».

Combien de séances et pendant combien de temps ?

  • 10 jours en personne : séances quotidiennes axées sur la tolérance à la charge, la variabilité des mouvements et l’état d’esprit,
  • 6 semaines à distance : 3 séances de musculation, 2 jours d’agilité / chaos, 1 jour de récupération par semaine,
  • Contrôles quotidiens par WhatsApp pour la responsabilisation et le retour d’information.

 

Résultats

Dès la quatrième semaine de téléconsultation, il a effectué un entraînement complet. À la sixième semaine, il a joué un match inter-équipe complet.

Son dernier message ? « Je ne pensais pas me sentir aussi calme. Je pensais que j’aurais été terrifié ».

 

Les leçons à tirer de l’expérience clinique

  • La douleur n’est pas corrélée à la performance.
  • Les tests sont utiles, mais l’écoute vaut de l’or.
  • Le retour au sport ne consiste pas à autoriser l’athlète à reprendre le jeu. Il s’agit de le préparer.
  • La véritable rééducation va au-delà des seuils physiques – elle aide les athlètes à réajuster la façon dont ils réagissent émotionnellement aux exigences de leur sport.
  • Demandez à l’athlète ses préférences (comme le Dry Needling), mais ne le laissez pas diriger le processus.
  • Les conditions météorologiques, la surface et le contexte du match sont importants – préparez-vous en conséquence.

 

Conclusion

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