Les ruptures du LCA sont l’une des blessures du genou les plus courantes dans le sport. Ce sont des blessures se produisant généralement sans contact : elles impliquent souvent une augmentation rapide de la charge en flexion, de grands degrés de valgus et de rotation du genou. Imaginez-vous un mécanisme lors duquel le membre inférieur se plante dans le sol puis pivote. Les taux de récidive des lésions du LCA sont élevés et entraînent une longue réadaptation pour l’athlète / le patient. En raison des taux élevés de récidive, il est essentiel que les cliniciens effectuent des tests appropriés avec leurs athlètes afin d’optimiser les processus de la rééducation et de la reprise sportive.
Les critères de reprise sportive comportent certains éléments de base non négociables, que Mick Hughes aborde dans les revues de littérature de Physionetwork, tels qu’une douleur < 2/10, une flexion du genou supérieure ou égale à 95 % par rapport au côté sain, une extension complète et une absence d’épanchement. Le but de ce blog est de mettre en évidence les tests que les cliniciens pourraient envisager dans le cadre de la reprise sportive.
1) Force du quadriceps
Bien que vous n’ayez probablement pas eu besoin de lire un blog pour comprendre l’importance de la force du quadriceps lors de la rééducation après reconstruction du LCA, il est surprenant de découvrir que cela est souvent négligé. Comme l’a déclaré le Dr Jarred Boyd dans cette revue de littérature, il est essentiel d’accorder « une attention à la restauration de la force du quadriceps », étant donné que la capacité du quadriceps est associée à des scores IKDC (International Knee Documentation Committee) élevés (il s’agit de critères de jugement rapportés par le patient).
L’étude examinée était une étude transversale incluant 48 patients physiquement actifs avec reconstruction du LCA, 5 mois après la chirurgie. La force isométrique du quadriceps, les single leg forward hop tests [test de sauts unipodaux vers l’avant] et l’IKDC ont été évalués. Les résultats ont révélé une faible capacité du quadriceps, avec un moment de force maximale de 37,5% et un indice de symétrie du membre inférieur (LSI) de 41,7.
Ne pas réussir à retrouver une force suffisante après la chirurgie augmentera la probabilité de se blesser à nouveau. Lors des dernières phases de la rééducation, les exercices de sauts sont souvent utilisés pour faciliter la reprise sportive, mais ils ne permettent pas une évaluation précise de la force du quadriceps. Progresser les exercices vers le saut en l’absence d’une force unilatérale suffisante du quadriceps pourrait entraîner des changements cinématiques au niveau du genou, de la hanche et de la cheville. Cela souligne l’importance de rétablir la capacité et la symétrie de l’extension du genou afin de réduire les risques d’une potentielle blessure future et de réintégrer le sport.
Par conséquent, l’évaluation et le traitement de la force d’extension du genou, que ce soit à l’aide d’un dynamomètre ou du calcul du nombre de répétitions maximales, sont essentiels pour progresser vers la reprise sportive. La prochaine fois que quelqu’un vous dira qu’évaluer et rééduquer l’extension du genou de manière isolée n’est pas fonctionnel, vous pourrez le renvoyer à cette revue de littérature ici.
2) Les opposants au LCA
Bien que la force d’extension du genou soit essentielle, ce ne sont pas les seuls muscles qui contribuent à l’augmentation des contraintes sur le LCA.
Dans une étude examinée ici par le Dr Teddy Willsey, les auteurs ont cherché à identifier comment certains muscles spécifiques des membres inférieurs contribuent à l’augmentation des contraintes sur le LCA. Plus précisément, ils ont mis en évidence que les ischio-jambiers, le soléaire et le moyen fessier semblaient avoir la plus grande capacité à s’opposer à l’augmentation des contraintes sur le LCA, tandis que le quadriceps et les gastrocnémiens induisaient les plus grandes contraintes sur le LCA.
Cela signifie-t-il que vous devez posséder un dynamomètre isocinétique dernier cri pour évaluer ces muscles ? Si vous êtes en mesure d’évaluer et de suivre objectivement les changements quantitatifs au fil du temps dans le but de faciliter la reprise sportive, je ne pense pas que ce soit essentiel. Au lieu de cela, vous pouvez effectuer une évaluation de la 6-8 RM avec une presse, pour la flexion en position assise ou allongée et pour l’extension de cheville en position debout ou assise. Suivre les changements au fil du temps et chercher à obtenir un score supérieur à 90 % pour toutes les évaluations du membre inférieur comparativement au côté sain sera bénéfique pour réduire les blessures à long terme et assurer une progression en toute sécurité lors des différentes étapes de la rééducation.
Cependant, la méthodologie de l’étude présentait des limites importantes, que vous pouvez lire dans la revue de littérature ici.
Dans une étude examinée par Mick Hughes dans les revues de littérature de Physionetwork, les auteurs ont recommandé d’obtenir un indice de symétrie du membre inférieur (LSI) supérieur à 70 % pour les ischio-jambiers. Ils ont également recommandé l’évaluation du squat unipodal ou de la montée sur une marche, en surveillant toute augmentation du valgus du genou.
3) Sauts vers l’avant
Le processus de reprise sportive est difficile et une batterie de tests fonctionnels peut aider à minimiser les risques de blessures et à maximiser les performances. Les tests de sauts constituent un élément populaire parmi les tests fonctionnels en raison de leur facilité d’administration et de notation. Dans une revue de littérature, Travis Pollen a exploré une étude dont l’objectif était d’examiner l’utilité des tests de sauts horizontaux unipodaux [forward hop tests] pour la prise de décision concernant la reprise sportive. Lors des tests de sauts horizontaux unipodaux, la distance totale des sauts sur le membre concerné est divisée par la distance des sauts sur le membre sain, puis elle est multipliée par 100. Un indice de symétrie des membres inférieurs de 90 % constitue le critère de réussite.
Les tests de sauts horizontaux unipodaux comprennent le saut unipodal unique [single-leg hop], le triple saut sur une jambe [triple hop], le saut croisé [crossover hop] et le saut chronométré sur six mètres [six-metre timed hop]. Cependant, les auteurs ont souligné que l’évaluation des 4 pourrait être redondante et que réaliser seulement 2 tests sur 4 permettrait d’utiliser le temps imparti d’une meilleure manière. En raison du manque de consensus sur les tests à choisir, les tests les plus appropriés sont ceux qui sont les plus pertinents selon les exigences spécifiques relatives au sport pratiqué.
Il peut même être plus pertinent d’évaluer les sauts en rotation ou verticaux avec votre athlète, malgré le manque de preuves de ceux-ci dans la littérature. Bien sûr, il ne s’agit pas seulement de la distance parcourue, mais aussi de la qualité du mouvement. Cela souligne l’importance d’utiliser de multiples critères pour déterminer si le patient est prêt à reprendre le sport. Cependant, cette revue comportait de nombreuses limites, vous pouvez en lire davantage ici.
4) Sauts verticaux
Les sauts verticaux pourraient constituer une évaluation plus spécifique de la fonction du genou que les sauts horizontaux. Par exemple, lors d’un saut horizontal, décoller avec plus de flexion de hanche permettrait d’obtenir un bon indice de symétrie des membres inférieurs, mais cela pourrait être dû à une demande plus importante de la musculature de la hanche en flexion de hanche, masquant ainsi les déficits en diminuant la charge sur le genou. Dans une revue de littérature récente rédigée par Sam Blanchard, ce dernier a analysé une étude visant à déterminer si le saut vertical est une méthode plus simple pour évaluer la fonction du genou et la reprise sportive.
Les auteurs ont réparti 48 participants en deux groupes : 26 athlètes avec reconstruction du LCA qui avaient été autorisés à reprendre le sport et 22 témoins. Ils ont recueilli des données concernant le single leg countermovement jump [saut précédé d’une flexion servant de prise d’élan] et la phase réactive (atterrissage initial) du single leg drop jump [à partir d’une hauteur, le patient se laisse tomber sur une jambe puis réalise un saut]. Fait intéressant, le groupe avec reconstruction du LCA a démontré une symétrie de 83 % et 77 % pour la hauteur de saut lors du countermovement jump et le drop jump. En revanche, les témoins ont démontré respectivement 98 % et 100 %.
Compte tenu des déficits mentionnés ci-dessus, nos critères actuels de reprise sportive sont-ils suffisants ? Ne pas évaluer les sauts verticaux et ne compter que sur les sauts horizontaux, où la symétrie peut être atteinte en dépit des déficits, peut entraîner de mauvais résultats après une ligamentoplastie. Les sauts verticaux entraîneront une demande plus importante de l’articulation du genou, ce qui est plus pertinent dans le contexte de lésions du LCA, étant donné que celles-ci semblent se produire lorsque le genou est à 20-30 degrés de flexion. Un contrôle suffisant de la flexion du genou est essentiel pour réduire les stratégies de compensation au niveau de la hanche et du tronc, soulignant l’importance de renforcer les quadriceps, les ischio-jambiers et les soléaires.
Comme l’indique la revue de littérature, les programmes de rééducation après ligamentoplastie devraient cibler le renforcement du soléaire afin d’améliorer les résultats en matière de performance. Pour plus de détails sur les méthodes ainsi que des vidéos des évaluations effectuées dans cette étude, consultez la revue de littérature ici.
5) Disposition psychologique
Il est bien établi que la ligamentoplastie ne garantit pas un retour au sport. Compte tenu du manque de confiance et de la peur de se blesser à nouveau, un autre domaine qui ne peut être négligé est la disposition psychologique à la reprise sportive. Une revue de littérature rédigée par Mike Hughes ici s’est plongée dans une étude ayant examiné ces facteurs 1 an après opération.
Cette étude incluait 124 athlètes ayant subi une reconstruction du LCA. Tous les participants ont suivi un programme de rééducation standard et ont été autorisés à reprendre le sport entre 8 et 10 mois. Les participants ne pouvaient reprendre le sport que s’ils obtenaient des amplitudes symétriques, avaient une stabilité adéquate du genou et n’avaient pas d’épanchement du genou. Un an après l’opération, les participants ont complété un questionnaire sur leur disposition psychologique à la reprise sportive (questionnaire ACL-RSI) et on a évalué leur force isocinétique des quadriceps et des ischio-jambiers, la distance du single leg hop test et leur qualité de vie.
Après un an de suivi, 23 athlètes ne sont pas revenus à leur niveau de référence avant la blessure. 78 % de ces athlètes ont indiqué que la peur de se blesser à nouveau était la raison pour laquelle ils n’avaient pas retrouvé leur niveau. Bien qu’il soit essentiel d’avoir un suivi avec des mesures physiques dans le cadre de la rééducation, il en va de même pour les mesures psychologiques. Plus la confiance est faible, plus grande est la crainte d’une nouvelle blessure et plus grand est le risque d’une deuxième blessure du LCA.
Pour en savoir plus sur les résultats et les limites de l’étude, consultez la revue de littérature ici.
Pour résumer
Il s’agit d’une liste non exhaustive de critères de jugement qui peuvent être pertinents ou non pour votre athlète lors de la reprise sportive. Pour en savoir plus et vous assurer que vous êtes confiant dans votre capacité à évaluer les athlètes après reconstruction du LCA, consultez les revues de littérature pour plus d’informations sur le sujet.
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